Elle attend patiemment qu'un homme se déclare
Seule assise sur sa chaise les yeux noyés dans les reflets
Sera-ce le prince charmant qui jamais ne l'achète
Ni pour qu'elle le baise, nui lui prendre son temps
Et elle voyage loin d'ici
Elle se perd dans ses rêves
Alors n'est plus de ce monde
Mais le patron la rappelle
Il s'enivre encore devant son piano miteux
Jouer du mauvais jazz pour les soûlards avachis
Il se promène au port quand il a fini son boulot
Et soudain il s'embrase quand il s'invente des tournées
Et ils sait qu'il est Mozart assassiné
Et il écrit des symphonies dans la mer
Et il voit jusqu'où elles peuvent le porter
Et dans sa bouteille il s'en va se coucher
Refrain
Dans les arrières-salles de toutes les solitudes
Où l'on vient quérir toutes les sollicitudes
Et échouer sa galère en plein milieu du bagne
Où l'ennui s'en va côtoyer toutes les misères
Où le bonheur n'est plus qu'un lointain mystère
Où l'on ne rêve même plus d'être le fils du roi d'Espagne
Il livre des pizzas aux gens qui le laissent à la porte
Il zigzague sous son casque le grand Zorro de la faim
Le dieu de la piazza aussi vite que l'éclair
Mais la réalité colle aux basques même des convoyeurs d'illusions
Il cherche de la hauteur
Du fond de ses kilomètres heures
Il se voit sur le Charles de Gaulle
Avec des ailes en plus tout au tour de la terre
Il vaut bien plus que toutes ces missions
Il n'est qu'une des faces de son héros
Il est bien plus que ce type minable
Qui a oublié de prendre le supplément chorizo
Sa pensée est nette aussi brillante que son parquet
Les enfants sont couchés, elle s'adonne aux plus grandes études
Derrière ses lunettes elle regorge de bonnes idées
Elle en aurait assez pour clore toutes les interrogations
Tous les domaines sont à ses pieds
Elle comprend jusqu'au cœur du noyau monde
Les pourquoi, les comment, les solutions évidentes,
Les raisons, les méthodes, les enjeux, les arguments
Elle est de taille à clore l'histoire
A en finir enfin avec les recherches
Elle a déchiffré tous les langages
Mais reste muette devant tant de ménage
Refrain 2
Dans les arrières pensées que l'on n'ose pas révéler
Du fond de ses espoirs que l'on n'osent pas pas réveiller
Se confronter à leurs mépris ou s'empaler sur des rocs
Les projets reculés, de peur de les voir impossibles
Ou sont abdiqués, de crainte de paraître risible
Où l'on ne rêve même plus d'être le fils du roi du Maroc
Il s'en va jouer son Loto hebdomadaire
Miser la chance de sa vie sur six carrés griffonnés
Engourdi de télé comme d'autres se perdent dans la drogue
Son existence abrutie dans les murs de son appartement
Il prie dans les boules de toutes les croyances
Il supplie qu'il ait encore d'autres parties
D'autres conditions, que les dés soient rejetés
D'autres lignes dans les tasses de café
Juste avant les nouvelles un peu d'extase
Il tient fébrilement son billet comme la clef du trésor
Quarante-six merveilles tournoient dans la bulle
Et au final, il n'en a que trois
Le fusil d'une main et dans l'autre il tient du Senghor
Il préfère ses rythmes à la ponctuation des balles
Et quand le chemin est déserté d'ennemis
Et il cherche une rime qui va avec rythme
Il aurait préféré être poète
Il n'est pas mort il n'a pas pu naître
Parler de son spleen, ses amours romantiques
Et puis le suicide s'il est trop fragile
Et dans sa tête sous ses cheveux crépus
Il est général de l'Académie Française
Il mène ses armées sur les lignes d'écriture
Mais c'est dans la débandade quand il faut tirer
Refrain 3
Dans les arrières-mondes où l'on vient chercher mieux
Ne pas vivre que de pain dans les asiles des dieux
Aussi loin qu'on peut de la Terre
Au-delà des errances grimper jusqu'à la transcendance,
Jusqu'à s'abêtir pour échapper à ses transhumances
Où l'on ne rêve même plus d'être la belle-fille de la reine d'Angleterre
Ni de Suède, ni de Belgique
La misère du monde, c'est du jazz !
Nos soucis de nantis, c'est du jazz !
Les pouvoirs financiers, c'est du jazz !
Les magouilles politiques, c'est du jazz !
Toute sa vie ratée, c'est du jazz !
Les catastrophes naturelles, c'est du jazz !
La paix du monde, c'est du jazz !
Les religions, les philosophies, c'est du jazz !
La mort des gens qu'on aimait, c'est du jazz !
Le passage à l'euro, c'est du jazz !
Le passage des frontières, c'est du jazz !
Le passage du temps, c'est du jazz !
Les Droits de l'Homme, c'est du jazz !
Les Droits des enfants, c'est du jazz !
Les Droits des Chiens, c'est du jazz !
Le poisson au dîner, c'est du jazz !
Chirac ou Jospin, c'est du jazz !
La blonde ou bien la brune, c'est du jazz !
Ad libitum jusqu'à ce que tout le public ne parte…
Photo d’entête : “Steve William on his birthday! – Tardo Hammer Trio | 160107-2189-jikatu” par Jimmy Baikovicius
